Du dimanche 29 janvier au samedi 4 février 2017 se tiendra la Semaine nationale de prévention du suicide, sous le thème « Le suicide n’est pas une option ».

Cette semaine vise à susciter un changement de culture par rapport  au suicide, en sensibilisant la population à l’ampleur du problème et aux moyens de le prévenir. Comme l’indique le thème de cette semaine, le suicide ne devrait jamais être une option. Malheureusement, pour les personnes vivant une grande détresse et ne recevant pas de soutien, il peut être perçu comme une solution pour mettre fin à leur souffrance. La prévention du suicide passe donc par le dépistage des personnes suicidaires et leur relais vers des ressources pouvant leur venir en aide. Toutefois, la prévention du suicide implique également d’intervenir auprès de personnes en détresse, avant même l’arrivée des premières pensées suicidaires. Agir pour prévenir le suicide, c’est d’abord et avant tout tendre la main à toute personne traversant une période éprouvante.

Le travail : un lieu d’intervention de première ligne

Le milieu de travail constitue, pour une majorité de la population, un lieu structurant pouvant répondre à plusieurs besoins. Effectivement, en plus de combler nos nécessités « alimentaires », le travail a le potentiel de nourrir nos besoins de reconnaissance, de développement et d’actualisation de soi ainsi que certains besoins sociaux d’appartenance et d’intégration à une communauté. Il s’agit donc d’un espace social propice pour :

  • dépister des personnes qui traversent une épreuve ou une période plus difficile, qu’il s’agisse de difficulté personnelle ou professionnelle;
  • poser un premier geste concret pour aider la personne en difficulté à obtenir de l’aide.

Comment reconnaître une personne en détresse?

Il existe un mythe tenace voulant  que les personnes qui font une tentative de suicide passent à l’acte sans donner de signe à leur entourage. Dans la majorité des cas, cette présomption est fausse. La plupart  des personnes donnent des signes, mais l’entourage n’est pas toujours bien outillé pour les détecter et les comprendre. Il en va de même pour la détresse de nos proches, qu’il s’agisse de la famille, des amis ou des collègues de travail. Il est vrai que plusieurs personnes tentent de camoufler leurs difficultés lorsqu’elles sont en milieu de travail. Néanmoins, en étant attentif, on peut souvent observer des changements chez une personne qui vit une détresse importante. On peut observer des signes et des comportements liés à des changements d’humeur :

  • des manifestations plus fréquentes d’irritabilité ou de colère (dans les paroles ou les gestes);
  • une augmentation des incidents ou des conflits avec des collègues de travail;
  • des manifestations plus fréquentes de tristesse (ex. des pleurs);
  • le retrait social;
  • une perte d’intérêt ou de plaisir pour les activités habituellement appréciées.

On peut aussi noter des changements cognitifs qui affectent l’efficacité et la productivité de la personne :

  • des problèmes de mémoire et de concentration;
  • des retards dans les échéances des projets ou des tâches;
  • un absentéisme plus fréquent;
  • une augmentation des erreurs.

La détresse peut aussi se manifester sur le plan physique et physiologique :

  • des difficultés de sommeil;
  • une augmentation des plaintes de fatigue et de douleurs physiques;
  • une négligence dans l’apparence (ex. tenue vestimentaire moins soignée);
  • des troubles de l’appétit (perte ou gain de poids).

Finalement, certaines personnes développent, lors de moments de détresse, des comportements liés à la dépendanceà l’alcool, aux drogues, au jeu ou à la consommation. Ces comportements, lorsqu’ils prennent plus d’ampleur, peuvent aussi avoir des conséquences au travail.

Une fois la détresse identifiée, que pouvons-nous faire?

Un réflexe commun, lorsqu’on observe des signes de détresse chez un proche, est de les minimiser. Le plus souvent, ce réflexe est lié à un malaise par rapport à la détresse : nous ne savons tout simplement pas comment réagir. Nier ou minimiser l’importance de ces signes est toutefois à proscrire. Il n’est pas non plus recommandé de conseiller la personne en détresse. Comme vous n’êtes pas un intervenant en relation d’aide, évitez de lui donner vos recommandations. Néanmoins, même si vous n’êtes pas un professionnel de la santé mentale, vous pouvez tout de même poser de petits gestes qui pourraient faire une grande différence

  1. Osez partager vos observations avec la personne concernée. Avouer sa propre détresse est souvent très difficile, car nous entretenons encore, en tant que société, des tabous et des idées fausses sur la santé mentale. Les personnes ont donc souvent peur d’être jugées. N’attendez donc pas que votre collègue vienne vous voir pour faire une demande d’aide. Prenez les devants et ouvrez directement le sujet, avec délicatesse. Vous pouvez, par exemple, exprimer à la personne que vous êtes préoccupé par son état, car vous avez observé certains changements dans son comportement. Vous pouvez expliquer que vous vous questionnez sur les raisons de ces changements et que vous aimeriez en discuter avec elle. Vous pouvez aussi lui demander tout simplement comment elle va et montrer que vous êtes sincèrement intéressé par la réponse.
  2. Soyez à l’écoute des réponses que la personne vous fournit, sans jugement. La première chose dont la personne a besoin, c’est d’être entendue et écoutée. Soyez attentif, démontrez votre intérêt pour la personne, posez des questions pour mieux comprendre sa situation. Évitez de porter  des jugements de valeur et de donner des conseils. Laissez ce type d’intervention à un professionnel habilité.
  3. Faites appel à d’autres personnes, si nécessaire. Si vous observez des signes de détresse chez un collègue, mais que vous n’avez pas développé de lien significatif avec elle, faites appel à une autre personne en qui elle a confiance : un supérieur ou un autre collègue.
  4. Dirigez la personne vers des ressources qui peuvent l’aider. Si la personne confirme vos doutes et traverse effectivement une période difficile, vous pouvez lui suggérer de consulter un professionnel : un médecin, un psychologue, un travailleur social ou tout autre professionnel pertinent. Il existe aussi plusieurs organismes communautaires qui offrent des services de soutien variés, allant de la thérapie au groupe de soutien. Vous pouvez consulter différents répertoires pour mieux les connaître.
  5. Si la personne exprime des idées suicidaires, faites appel à une ressource appropriée. Dans l’éventualité où votre collègue évoque clairement des idées suicidaires, invitez cette personne à aller chercher de l’aide. Vous pouvez aussi l’accompagner dans cette démarche, si elle le souhaite. Si elle refuse cette aide, ne restez pas seul dans cette situation. Avisez votre supérieur et contactez une ligne d’intervention comme Suicide-Action Montréal pour obtenir du soutien et des conseils. Suicide-Action Montréal :
    • 514-723-4000 (si vous êtes à Montréal)
    • 1-866-277-3553 (si vous êtes à l’extérieur de Montréal)
  6. Soyez discret. Lorsqu’un collègue s’ouvre à vous, il vous témoigne de la confiance qu’il vous porte. Soyez délicat et respectueux; évitez de partager les confidences de votre collègue avec d’autres personnes, à moins que ce partage d’informations permette de mieux lui venir en aide. Ainsi, bien agir devant la détresse d’un collègue de travail vous demandera de faire appel à quatre habiletés essentielles : la capacité à observer et à détecter les signes qui se présentent à vous, le courage d’expliquer vos observations à la personne concernée, une écoute attentive et le réflexe de référer vers les ressources appropriées. Ces petites actions pourront sans aucun doute faire une grande différence pour la personne concernée. N’hésitez donc pas!