Comment favoriser le recours à l’esprit critique dans ses équipes
2024-10-01
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https://www.revuegestion.ca/comment-favoriser-le-recours-a-lesprit-critique-dans-ses-equipes
2024-10-16
Comment favoriser le recours à l’esprit critique dans ses équipes
Management , Communication , Ressources humaines
Si l’on parle généralement de l’esprit critique dans un contexte individuel, il est toutefois possible d’en faire une force collective au sein d’une équipe ou d’une organisation. Quelques pistes de réflexion pour inspirer les gestionnaires.
Inciter les employés à faire preuve d’esprit critique passe d’abord par la mise en place d’un environnement où les conditions sont favorables. «Dans une organisation saine, on encourage une culture délibérative et ouverte, où l’on peut discuter et se montrer en désaccord avec l’opinion d’autrui», explique Dave Anctil, professeur de philosophie au Collège Jean-de-Brébeuf et chercheur associé à l’Observatoire international sur les impacts sociétaux de l’intelligence artificielle et du numérique de l’Université Laval. Il soutient aussi la nécessité d’adopter une approche inclusive où chacun sera encouragé à s’exprimer.
Rafael Ziegler, professeur agrégé au Département de management de HEC Montréal, prévient que parfois, ce sont toujours les mêmes membres de l’équipe qui prennent la parole, en réunion par exemple. «Attention quand quelques personnes dominent systématiquement la réflexion. Le gestionnaire doit s’assurer d’accorder de l’espace à tous et de prendre le temps d’écouter tout le monde», mentionne-t-il. La vigilance est de mise, car certains employés peuvent préférer se taire, craignant de commettre des erreurs. Le gestionnaire aura donc à cœur de leur expliquer que leur opinion est importante et qu’ils peuvent se sentir en confiance dans un espace de discussion où la participation est valorisée.
Réflexion et rigueur
Cultiver une culture de réflexion et de rigueur est un autre incontournable si l’on veut encourager la pensée critique au sein de son organisation. «Les entreprises peuvent avoir tendance à valoriser les individus qui font preuve de beaucoup de leadership. Mais elles doivent aussi reconnaître les gens qui font preuve de sérieux, qui sont méthodiques et prennent le temps de réfléchir», note Dave Anctil.
Donner la priorité à la productivité et à la vitesse peut aussi conduire à faire des compromis discutables – contourner des lois et des règlements par exemple – ce qui, ultimement, coûtera très cher à l’entreprise. En effet, celle-ci pourrait perdre à la fois des millions de dollars et sa réputation.
Le professeur suggère également de miser sur la formation continue des employés. Selon lui, il s’agit d’une bonne façon de s’assurer qu’ils disposent d’outils et de méthodes nécessaires pour alimenter leur pensée critique et développer de nouvelles perspectives.
Normaliser la pensée critique
Pour normaliser la pensée critique au sein de son équipe, le gestionnaire doit aussi avoir le courage de s’interroger sur lui-même, de se remettre en question, mais aussi de faire preuve de transparence lorsqu’il commet une erreur. De celle-ci, il tirera des leçons au lieu de la balayer sous le tapis, ce qui constituera du même coup un exemple inspirant pour ses troupes.
La mise en place d’un espace de sécurité psychologique, d’un environnement où chacun se sentira en confiance et libre de s’exprimer, est également indispensable. «Pour encourager le débat au sein des équipes, il faut aussi cesser de croire que lorsqu’un désaccord émerge, c’est systématiquement négatif. Au contraire, il est préférable de favoriser la discussion et de donner le temps à chacun d’argumenter», insiste Dave Anctil.
Pourtant, des gestionnaires ont encore tendance à confondre critique et négativité. «Remettre en question un point de vue ne signifie pas pour autant que l’on adopte une attitude négative. Inversement, on doit éviter de tomber dans la pensée positive et l’optimisme à tout prix. Cependant, il est vrai qu’il y a une façon de dire les choses et d’émettre des critiques constructives», prévient le professeur.
Des mécanismes éprouvés
Pour valoriser l’usage de la pensée critique au sein des équipes, il existe des mécanismes éprouvés. Comme avoir recours à des séances de brainstorming structurées, mais aussi réfléchir aux problèmes en groupe multidisciplinaire afin de multiplier les éclairages et les points de vue. «Intégrer des personnes issues d’autres départements permet de faire émerger des solutions différentes et pertinentes. Par exemple, dans le domaine des TI, les technologues qui sont en contact direct avec la clientèle pourraient être d’un apport précieux pour les ingénieurs. On instaure une rétroaction constructive entre les équipes tout en évitant le travail en silo», souligne Dave Anctil.
Dernier conseil : un gestionnaire de proximité qui prend soin de demeurer en contact avec ses troupes, sait garder l’esprit ouvert et donner l’exemple, met toutes les chances de son côté pour favoriser l’émergence et le recours à la pensée critique dans son organisation.
Pour aller plus loin
Pinker S., Rationalité : ce qu’est la pensée rationnelle et pourquoi nous en avons plus que jamais besoin, Les Arènes, 2022, 448 pages.
Heath, J., Les lumières de la raison. Cultiver l’art d’être rationnel dans un monde qui l’est de moins en moins, Fides, 2021, 142 pages.
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