Comment calmer son impatience au travail
2024-09-04
French
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2024-08-30
Comment calmer son impatience au travail
Stratégie , Communication , Ressources humaines
En cette ère d’instantanéité, l’impatience nous guette. Il n’est pas rare de vouloir obtenir (trop) rapidement ce qu’on désire. Mais est-ce toujours négatif? Et surtout, comment gérer cet élan et limiter les dommages collatéraux?
Un vilain défaut, l’impatience? Pas toujours, selon Jennifer Gabriele, associée et responsable du développement des leaders et des équipes chez Humance. «Beaucoup de personnes pensent que leur supérieur va se rendre compte de leur valeur et leur offrir une promotion. Cependant, démontrer une certaine impatience à grimper les échelons, plutôt que d’attendre que quelque chose se passe, est positif. Cela prouve qu’on est motivé, proactif», explique-t-elle.
Être animé d’une certaine forme d’impatience permet ainsi de provoquer les choses, au lieu de rester dans l’ombre, souligne-t-elle. «Bien sûr, il ne faut pas utiliser tous les prétextes pour discuter promotion avec son patron. Mais je pense que c’est important de mentionner son intention et d’éclaircir avec lui ce qui est attendu pour y arriver, quels sont les délais, les processus, les étapes à suivre.» C’est une façon de bien doser ses efforts et de revenir à la charge, au moment opportun.
Tracer sa route
En réalité, cette envie d’aller (parfois) plus vite que la musique va souvent de pair avec des gens qui carburent à l’action, soutient Éric Provencher, CRHA, psychologue organisationnel et fondateur d’HUMANA conseil. «Je constate cette propension chez beaucoup d’entrepreneurs, qui sont en quelque sorte impatients d’être impatients. Ça roule et ils doivent décider avant même d’avoir réfléchi.» Cette capacité à réagir rapidement et à aller de l’avant est certainement une qualité dans plusieurs circonstances, fait-il valoir. «C’est surtout quand les choses s’embourbent que l’impatience arrive, ce qui peut engendrer des problèmes au niveau des équipes et du climat de travail.»
Pour Luc Brunet, professeur titulaire en psychologie du travail et des organisations au Département de psychologie de l’Université de Montréal, l’impatience est souvent le fait de personnes anxieuses ou compulsives. Si les unes sont dans l’anticipation, les autres ne sont jamais satisfaites et en veulent toujours plus. «On le voit aussi dans les environnements très compétitifs, où les employés sont pressés d’en arriver au produit final.»
Les risques de l’impatience
Peu importe la situation, prendre des décisions de façon précipitée comporte certains risques, comme celui de se tromper, de tourner les coins ronds ou de mal lire la situation, ajoute le professeur. «Souvent, quand on est impatients, on fait des actions que l’on ne devrait pas faire. Mais ce n’est pas en donnant un coup de poing sur son ordi qu’il va mieux fonctionner, illustre le professeur. Je caricature, mais j’ai déjà vu cela.»
D’ailleurs, l’impatience s’accompagne souvent de mouvements d’humeur. «Quand on est trop dans l’action, on peut s’échapper, soupirer, lancer une remarque tranchante, souligne Éric Provencher. On associe aussi souvent l’impatience avec l’irritabilité, à l’intolérance.» Or, les tempéraments les plus bouillants ont tout à gagner à tempérer leurs ardeurs s’ils ne veulent pas se mettre à dos leurs collègues – ou leurs employés, indique-t-il.
Réfléchir avant de… réagir
Pour Luc Audet, l'impatience naît souvent de l'ambiguïté ou de la pression exercée sur les employés pour qu’ils en donnent toujours plus. Ainsi, si une personne sent que la moutarde lui monte au nez, il suggère de prendre le temps d’identifier précisément la cause. «Est-ce un manque d'informations, de ressources ou même de soutien pour effectuer ce qui est attendu de nous? Autrement dit, il faut comprendre sur quoi on bute. Ensuite, il ne faut pas hésiter à demander de l'aide.» Est-il possible de réajuster ses échéanciers ou de se tourner vers un collègue – ou même un professionnel tel qu'un comptable – si l'on doit jongler avec des chiffres pour avancer son dossier?
Autre source d’impatience : l’instantanéité des communications. En effet, avec l’utilisation d’outils tels que Teams, on s’attend souvent à recevoir une réponse immédiate, constate Jennifer Gabriele. «Comme nous ne voyons pas la personne, nous pouvons avoir l’impression qu’elle ignore notre message, mais elle est peut-être tout simplement occupée ailleurs.» Pour éviter les malentendus, elle conseille d’établir un mode de fonctionnement au sein de son équipe, permettant de clarifier des questions telles que le délai de réponses, de définir ce qu’est une urgence et les moyens de rejoindre les autres selon chaque cas de figure.
Freiner l’escalade
De son côté, Éric Provencher rappelle que c’est rarement un événement isolé qui fait exploser notre niveau d’impatience, mais plutôt l’accumulation de plusieurs irritants. «Il faut développer ce qu’on appelle en psychologie la conscience de soi et apprendre à décoder les signaux qui montrent que notre stress augmente.» Pour s’entraîner, le psychologue propose de prendre le temps d’évaluer quatre fois par jour notre niveau de tension, sur une échelle d'un à dix. «Quand on est rendu à 7, 8 ou plus, c’est là qu’on peut voir des comportements inappropriés apparaître.»
Quand ça grimpe, il suggère d’utiliser des méthodes pour gérer notre stress – comme sortir faire quelques pas ou visualiser la dernière fois où on est allés à la plage – pour réduire nos tensions. «Et vous avez le droit de dire, excusez-moi, je vais vous revenir plus tard lorsque vous sentez que c’est trop. Il faut se donner le droit de se retirer avant de s’énerver», explique-t-il.
Au quotidien, pratiquer des exercices comme la méditation, la marche en forêt ou simplement prendre le temps de s’asseoir sur son balcon avec une boisson chaude ne peut pas faire de mal, ajoute-t-il. «Il faut cultiver ces moments de plénitude, d’autant que les personnes très impatientes sont souvent très actives», soutient-il. De plus, le fait de se souvenir que c’est normal que les choses aillent parfois de travers permet de remettre les choses en perspective et de se calmer, note le psychologue. «Il est important de garder à l'esprit qu'à moins d'être extrêmement malchanceux, entre 20 et 30 % des choses peuvent mal tourner chaque jour. Comprendre cela peut nous aider à réagir de manière moins excessive, à relativiser plutôt que d’être fataliste.»
Stratégie , Communication , Ressources humaines