Article publié dans l'édition printemps 2017 de Gestion

Dans un fascinant projet de recherche nommé Aristote, la société Google a tenté de déterminer les constituantes d’une équipe exceptionnelle. La découverte de ses chercheurs : cela dépend moins des personnes qui font partie de l’équipe que d’une norme de groupe particulière, c’est-à-dire la sécurité psychologique. Il s’agit de la croyance selon laquelle l’équipe constitue un espace sécuritaire pour prendre des risques, où les individus ne seront pas punis, rejetés ou embarrassés s’ils osent s’exprimer. En d’autres termes, il faut rechercher les équipes où on ne doit pas porter de masque !


LIRE AUSSI: Équipes de travail - Les suites du mouvement #Moiaussi


Une affiche conçue et réalisée par une équipe gouvernementale de la Grande-Bretagne a récemment suscité une grande agitation dans les médias sociaux. Des copies en avaient été affichées dans les bureaux des nouveaux employés de la fonction publique britannique pour leur parler de la culture organisationnelle : « Ici, il est tout à fait acceptable de [...] dire qu’on ne sait pas, qu’on ne comprend pas, de demander de l’aide, de ne pas tout savoir, de demander des clarifications, de dire non quand on est trop occupé, etc. »

L’engouement qu’a créé cette idée n’est pas surprenant : combien parmi nous souhaiteraient fonctionner dans un tel milieu de travail ? Or, la plupart des gens se retrouvent bien souvent dans des environnements où l’erreur est mal vue, où la dissidence est suspecte et où la vulnérabilité pose des risques. S’il est plus plaisant d’évoluer dans une atmosphère de travail où on peut être soi-même, se pourrait-il également que ce soit la clé des équipes performantes ? Il semble que la réponse soit oui !

Dans un environnement à haute sécurité psychologique, il est non seulement accepté mais aussi valorisé d’émettre ses idées, ses préoccupations, ses états d’esprit, ses questions et ses erreurs. Si l’optimisation des performances individuelles a atteint ses limites, le succès des organisations provient de plus en plus souvent des équipes de travail, et l’étude Aristote de Google apporte certainement un éclairage intéressant.

Créer un environnement sécuritaire sur le plan psychologique comporte plusieurs avantages. Les équipes où on se sent à l’aise d’être soi-même consacrent plus de temps à créer, proposer et innover, éléments essentiels au succès dans le nouveau monde du travail, plutôt qu’à se protéger et à gérer les impressions. On profite de l’intelligence collective au maximum. L’empathie et l’humanisme n’y sont pas des signes de vulnérabilité mais des atouts et des forces !

Cela commence d’ailleurs bien souvent par le patron. « Je n’ai pas la réponse et nous allons la trouver ensemble » : cette phrase n’est-elle pas plus inspirante et plus rassurante que l’expression d’une confiance en soi absolue et non discutable ? N’est-il pas plus inspirant de viser l’excellence plutôt que la perfection irréaliste, paralysante et anxiogène ?

insecurite psychologique

Sources : Edmondson, A., Building a Psychologically Safe Workplace (document vidéo), TEDxHGSE, 5 mai 2014. • Duhigg, C., « What Google Learned From its Quest to Build the Perfect Team », The New York Times Magazine, 25 février 2016, p. MM20.