Réaliser une acquisition est un moyen rapide de faire croître son entreprise. Cependant, c’est une transaction qui comporte plusieurs risques. Afin de réussir, il faut la préparer soigneusement. Dans cette série de 4 articles, découvrez les étapes importantes à suivre : avant, pendant et après une acquisition.

Pendant l’acquisition : analyser en profondeur

Avant de conclure l’achat, il faut prendre le temps d’évaluer correctement l’entreprise convoitée. C’est en fonction du résultat de l’évaluation de l’entreprise à vendre que vous pourrez déterminer si le prix de vente est juste ou non, d’où l’importance de procéder à cette étape importante. Cette évaluation n’est pas une fin en soi, c’est un outil pour arriver à une entente négociée sur le prix.


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1- Effectuer une évaluation

Si importante soit-elle, l’évaluation ne peut établir la valeur de l’entreprise dans l’absolu. Elle doit tenir compte du contexte, du marché. C’est un exercice fondé sur l’anticipation des profits qu’une entreprise est susceptible de générer ou sur la comparaison avec le prix payé pour des sociétés similaires.

L’évaluation d’une entreprise réalisée dans le contexte d’une acquisition est comparable à celle d’un placement boursier : l’acquéreur veut payer un prix qui lui permettra d’obtenir un rendement favorable.

Il existe plusieurs méthodes d’évaluation. Elles sont toutes basées sur deux notions simples : la capacité de l’entreprise à générer des profits et le rendement auquel s’attendre sur le capital investi.

La capacité de l’entreprise de générer des profits est souvent exprimée par celle de gérer des flux de trésoreries libres, c’est-à-dire les surplus de liquidités qu’elle génèrera dans le futur.

Méthode des flux de trésorerie actualisés

Appelée « Discounted cash flow » (DCF) en anglais, c’est la méthode la plus courante et la plus avancée. Elle consiste à anticiper les flux monétaires (cash flows) que l’entreprise acquise va générer pendant sa vie utile et à en calculer la valeur actuelle en utilisant un taux d’escompte approprié.

L’exercice consiste donc à anticiper les flux de trésorerie, c’est-à-dire à effectuer des prévisions financières pour projeter les résultats et la situation financière de l’entreprise dans le futur.

Le modèle de prévisions financières doit permettre d’établir les flux de trésorerie libres que l’activité devrait générer dans le futur. La notion de flux de trésorerie libres est simple : c’est l’argent que le propriétaire va pouvoir empocher chaque année, après avoir assuré la survie et la croissance de son entreprise, le cas échéant. Il pourra choisir de réinvestir ces profits pour la faire croître soit par des investissements, soit par des acquisitions. Toute décision en ce sens devra être évaluée de la même façon : quelle sera la valeur des flux de trésorerie libres?


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Voici un modèle simple de prévisions financières pour illustrer comment établir les flux de trésorerie libres :

Dans le modèle de cash flow, les résultats historiques doivent servir de fondement aux prévisions financières. Mais ils ne font pas foi de tout. Il faut donc apporter des ajustements aux plus récents résultats pour les « normaliser », c’est-à-dire en enlever tout ce qui est propre aux propriétaires et qui ne représente pas fidèlement la réalité de l’entreprise acquise ou tout ce qui ne sera pas récurrent.

Par exemple, si des dépenses non essentielles à la conduite des affaires ont été encourues, elles ne seront peut-être pas nécessaires à l’avenir. De la même façon, des actifs superflus peuvent avoir été conservés par le propriétaire de l’entreprise et être vendus aussitôt l’acquisition conclue. À l’inverse, des revenus sont peut-être à réévaluer. Si une vente importante, mais exceptionnelle, a été réalisée avec un client, il vaut donc mieux ne pas la prendre en compte pour évaluer les flux futurs.

Bref, un « ménage » des états financiers historiques s’impose pour dégager le portrait le plus fidèle possible de ce que l’entreprise deviendra une fois acquise. Les résultats historiques, après avoir été redressés, servent à établir les prévisions financières pour en faire l’évaluation.

Les prévisions sont fondées sur les connaissances que l’acquéreur développe sur la cible, sur ce qu’il compte en faire. Elles doivent tenir compte des changements qu’il voudrait apporter. L’acheteur peut faire des scénarios (pessimiste, réaliste, optimiste) pour déterminer si les hypothèses sont raisonnables. Il peut vouloir se laisser une marge de manœuvre au cas où les choses n’iraient pas aussi bien qu’il l’envisageait. Les prévisions vont nécessairement s’affiner au fur et à mesure que la connaissance de l’entreprise ciblée s’améliore. Et ce, notamment grâce à la vérification diligente, qui consiste en l’examen approfondi des résultats de l’entreprise.

Estimer le rendement possible

Toute décision d’investissement se prend comme n’importe quelle décision d’affaires : le prix de vente doit dépasser le coût pour être en mesure de dégager des profits. Plus le risque de faire des profits est élevée, plus la marge potentielle doit être élevée. En évaluation d’entreprise, cette marge est représentée par le taux d’escompte utilisé pour calculer la valeur en date d’aujourd’hui des flux de trésorerie libres. Cela permet de compenser ces deux risques : plus le taux est élevé, plus l’évaluation du montant des flux de trésorerie prévus à long terme et des plus risqués sont diminués.

Un taux de rendement plus élevé est exigé dans le cas d’une petite entreprise en développement plutôt que pour une grande, qui a atteint sa maturité et dont les flux monétaires futurs sont souvent plus faciles à estimer.

D’autres facteurs peuvent également justifier d’exiger un rendement plus élevé. Par exemple, une entreprise fait face à un plus grand risque si elle œuvre dans un marché hautement concurrentiel par rapport à une autre, qui jouit d’un avantage concurrentiel indéniable (brevet, position avantageuse dans le marché, l’emplacement de ses établissements, ou encore parce qu’elle exploite une marque populaire). Celle qui n’aurait pas ce positionnement pourrait avoir à baisser ses prix pour conserver ses parts de marché. Il faut en tenir compte dans l’établissement du prix pour en faire l’acquisition.

Le rendement exigé pour faire l’acquisition d’une société privée se situe entre les deux extrêmes que sont le rendement que réalisent en moyenne les grandes sociétés dont les titres sont inscrits en bourse (environ 7 %), d’une part, et le rendement attendu des jeunes pousses (40 % et plus), d’autre part.

Mais le taux de rendement exigé n’est pas une science. Ce qui importe, c’est d’être conscient du taux exigé et de pouvoir établir clairement l’impact d’une variation de ce taux sur la valeur de l’entreprise. Rappelons que la méthode des flux de trésorerie actualisés permet de développer un modèle, à la base de la discussion sur le prix à payer pour réaliser une acquisition. L’objectif n’est pas d’obtenir une réponse exacte sur la valeur de l’entreprise, mais d’avoir une vision la plus claire possible afin de trouver le juste prix à payer.

Si le taux utilisé pour faire l’évaluation de l’entreprise est trop bas, l’entreprise pourrait être surévaluée. Le prix risque donc d’être trop élevé. Si le taux est trop haut, le prix sera bas et donc sûrement difficile à accepter par le vendeur.

La méthode des comparables

C’est une autre méthode largement utilisée pour l’évaluation d’entreprise dans le contexte d’une acquisition. Elle consiste à déterminer la valeur d’une entreprise en analysant le prix auquel d’autres sociétés comparables ont été vendues récemment selon des critères identiques de comparaison. L’échantillon, autant que possible, doit comprendre des organisations du même secteur d’activité, de la même taille, avec des résultats proches, situées dans une zone géographique similaire, etc.

Des ratios sont ensuite appliqués pour déterminer la valeur. À moins de réaliser une évaluation plus formelle fondée sur un DCF (Discounted cash flow), c’est le multiple Valeur d’Entreprise (VE) / bénéfice avant intérêts, impôts et amortissement (BAIIA) qui est le plus largement utilisé pour évaluer une entreprise à acquérir.

L’information de base utilisée est le BAIIA ou, autrement dit, le flux de trésorerie (cash flow) produit par les opérations, duquel sont déduits les frais financiers, l’amortissement et l’impôt. Ce montant doit aussi être ajusté ou « normalisé » tel qu’indiqué précédemment afin d’obtenir un chiffre représentant correctement la performance future anticipée de l’entreprise.

Pour en savoir plus, consultez l’article complet sur le site de Banque Nationale.